Killing Joke, by Alan Moore & Brian Bolland

 

KILLING JOKE

Souriez !

 





 

 

Une fois n'est pas coutume, on se penche aujourd'hui sur un genre littéraire bien particulier : le comics. "Killing Joke", originellement paru sous le nom "Batman : The Killing Joke", est un récit écrit par Alan Moore et dessiné par Brian Bolland, paru en mars 1988 chez DC Comics 😃


Très beau cadeau de notre Lilly nationale à l'occasion du salon Livre Paris, il m'a fallu quelques journée à m'extasier devant la couverture avant de pouvoir enfin prendre le temps d'ouvrir cet ouvrage. En tant que grande fan de la culture populaire américaine, j'ai toujours été très attirée par la dimension du comic book, sans pouvoir véritablement me plonger dedans pour de bon. Je n'ai jamais vraiment su par où commencer, ni par quel angle découvrir les richesses du genre. Mais c'était surtout l'univers de Batman qui m'intéressait particulièrement, après avoir été introduite dans les formes auprès de ce personnage.


Le premier volume des Nouvelles Aventures de Batman, paru chez Urban Comics, m'avait permis d'en apprendre plus sur les origines du justicier masqué et sur les premières apparitions de personnages phares tels qu'Harley Quinn - bien avant la sortie du film Suicide Squad, qui avait popularisé son nouveau look et qui n'avait fait que renforcer mon attachement pour la fiancée du Joker. Mais de toutes les histoires d'adversité qu'ait pu traverser Bruce Wayne, aucune n'a la même saveur que celle qui oppose Le Joker et le justicier depuis la nuit des temps (ou presque) 😉


Ainsi donc, sachant que Killing Joke se proposait de remonter aux sources mêmes de cet incroyable personnage qu'est Monsieur J., j'étais plus qu'impatiente d'en découvrir le contenu. Ce qu'il est intéressant de souligner dès le départ, c'est la prise de risque d'Alan Moore dans le scénario qu'il a imaginé pour les deux opposants. Proposer un point de départ à l'histoire du Prince du Crime, dont la particularité est justement de ne jamais donner la même version de ses propres origines, voilà un pari osé.


Ici, point de Harley Quinn ou de quelque maléfique aliéné échappé de prison - du moins, pas dès le départ. Enfin, si, pardonnez-moi, correction : l'histoire commence précisément par l'arrivée de Batman dans l'asile d'Arkham. En quelques planches silencieuses, toute la solennité du moment, relevé de touches mortellement comiques, nous plonge avec bonheur, mais non sans quelques frissons, dans cet univers si dark propre à Batman. C'est une immersion dans une réalité presque tangible, avec cette pluie humide et cette nuit houleuse, glacée. On volerait presque son café au commissaire Gordon pour se réchauffer ☕


À n'en pas douter, la palette de couleurs employées n'est pas étrangère à cette véracité, presque détachée pourtant. Ce qu'il faut savoir, c'est que Tim Sale, dessinateur reconnu de Batman - et dont les dessins sont notamment apparus dans la série Heroes en 2006 - nous apprend dans une préface brillamment menée que ce graphic novel, qui a directement sauté la case "feuilleton", s'est vu offrir un recolorisation par les soins de Brian Bolland, en lieu et place de celle de John Higgins, en 1988.


J'en viens à devoir user des mêmes mots que l'artiste qui a préfacé cet ouvrage, en soulignant la force des scènes de flashback qui peuplent épisodiquement ces pages, et dont la monochromie n'est que subtilement brisée par des éléments isolés dont la gradation rouge mène à la référence classique et presque oubliée à l'origine du Joker, datant de 1951.


Mais revenons-en à ce silence lourd et quasi-impénétrable qui marque le début du récit. Quelques mots griffonnés dans l'angle d'une case, voilà comment Alan Moore pousse un cri face au néant avec la délicatesse d'une brise et révèle l'essence même de l'ouvrage : "C'est deux mecs dans un asile de fous..."


Je pourrais m'attarder sur chaque case, chaque élément de dessin et de scénario avec un plaisir non dissimulé, mais je m'en voudrais sincèrement de vous spoiler des détails qui ne méritent rien d'autre qu'une découverte in situ. La seule chose sur laquelle je m'étendrai un peu, c'est sur la dimension proprement psychologique du récit.


D'aucuns s'accordent à dire que le Batman n'est autre qu'un personnage secondaire dans cette histoire, mettant en scène la spirale infernale dans laquelle s'est enfoncée le Joker. Bien que je rejoigne cet avis général, dans sa définition première, j'ai tout de même la sensation que le justicier et le clown triste sont une sorte de yin et de yang dans cette mise en exergue de la folie comme ultime refuge, et dans cette dualité qui les caractérise aussi bien personnellement que dans ce qui les lie, des liens quoique tordus mais bien réels.


Et cette chute, digne des plus grandes interrogations finales comme seuls les plus grands savent nous les concocter ! Inception, Shutter Islands, American Satan, autant de fins spectaculaires qui nous poussent à mille questions par le biais d'un élément marquant. Que penser ? Lorsqu'une fin reste ouverte de cette manière, on ne peut douter qu'il s'agit purement et simplement de l'intention définitive du marionnettiste.


Et si l'on n'ignore pas qu'il doit avoir sa propre vision secrète de la résolution, on ne peut être complètement assuré d'avoir trouvé la clé, la résolution ultime. Ce n'est certes pas avec le sens de l'à-propos malicieux et indéniable de Brian Moore, qui signe la post-face de ce roman graphique unique, que l'on en apprendra beaucoup plus sur la question 😏


Alors, on tire toutes les morales possibles de chaque interprétation, et peut-être moins un enseignement qu'un recul sur une situation unique en son genre. Il n'en reste pas moins que malgré une soif indéniable de réponses, on trouve une certaine satisfaction à se demander si « la blague qui tue » l'est vraiment : mortelle.


Un tout dernier mot enfin pour la courte série de planches "An Innocent Guy" (titré en français "Un Parfait Innocent") qui relève là-aussi du génie graphique, mais également scénaristique, bien que ce soit Brian Bolland qui ait géré les deux aspects - se lançant un défi de taille, mais parfaitement réussi. Une réflexion totalement tordue mais tellement bien menée, une psychologie finement esquissée et le tout relevé par des illustrations sublimes 👌


Le roman graphique se conclut sur "Les Dossiers Secrets de Brian Bolland", qui nous glisse des anecdotes et des planches originelles éclairées par le dessinateur lui-même, une parfaite conclusion pour refermer le livre sur une immersion résolument complète.


Vous l'aurez très certainement deviné, je vous recommande chaudement la lecture de ce plaisir visuel et psychologique que représente "Batman : The Killing Joke" ! 😉



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Le petit mot de la fin 🖋


Ce retour sur « Killing Joke » n’est que le fruit d’une appréciation générale de la lectrice perdue au milieu d’une foule de tant d’autres que je suis. Les remarques, positives comme négatives, qui y sont établies ne sont que le reflet de mon avis personnel sur la question et ne sauraient s’autoproclamer références en la matière ☝


N’hésitez donc jamais à ouvrir vous-mêmes ce livre pour vous en faire votre propre avis et si je ne pouvais vous donner qu’un conseil, terminez-le quoi qu’il en soit, afin d’avoir toutes les cartes en mains pour vous prononcer sur la qualité de celui-ci dans son intégralité 😉

N’oublions jamais qu’un roman dont la lecture ne nous prend que quelques heures représente en réalité des mois de travail acharné de la part de l’auteur, qui a mis une importante part de lui dedans et qui a pris le risque d’exposer son bébé au reste du monde 💚





                                                                                                                                              Roman-e


 

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