The Hate U Give, by Angie Thomas

 

THE HATE U GIVE

Un soleil qui brille par son sens et sa profondeur



 


On se retrouve aujourd'hui pour parler d'un livre qui a largement fait, eh bien, parler de lui, justement, depuis sa sortie en Avril 2018 chez les éditions Nathan : The Hate U Give, écrit par Angie Thomas 😃


Soyons honnêtes, bien que j'apprécie énormément les récits de vie construits et porteurs, je ne me serais pas nécessairement tourné vers un ouvrage tel que The Hate U Give sans en avoir largement entendu vanté les mérites depuis des semaines, voire des mois maintenant. Avec la sortie du film éponyme, c'est une véritable recrudescence d'activité autour de cette œuvre à laquelle j'ai assisté ces derniers temps, et ma curiosité s'en est retrouvée piquée. Un merci particulier donc à Marie Alhinho pour avoir largement diffusé son intérêt pour THUG, et un autre à Lilly pour avoir trouvé ce livre en version originale si rapidement 🤗


Si vous êtes passés à côté du pitch, le voici en quelques mots : Starr est une adolescente de seize ans, représentante de la communauté noire, qui mène une existence "ordinaire" (peut-être n'est-ce pourtant pas tout à fait le mot) entre son quotidien dans les quartiers afro-américains de Garden Heights et sa vie de lycéene à Williamson, où elle côtoie en grande majorité une population blanche. Alors qu'elle présente deux versions d'elle-même à chacun de ces deux milieux, sa vie vole en éclats quand son meilleur ami, Khalil, se fait assassiner devant ses yeux par un policier ayant présumé d'une situation inexistante. Entre les pressions des gangs locaux et une violente effervescence qui embrase son quartier, Starr va devoir faire un choix pour la liberté et la justice...


The Hate U Give commence de la manière la plus classique qui soit dans le domaine de la littérature Young Adult : par une fête. Un choix intéressant si l'on considère la suite des événements, puisqu'il symbolise le regroupement joyeux d'une jeunesse actuelle, brisé par deux réalités plus présentes que jamais - à savoir la tension des quartiers sensibles dirigés d'une main de fer par des gangs et l'atmosphère encore empreinte de racisme et de méfiance entre noirs et blancs.


Si vous espérez un récit bourré d'action, de rebondissements ou de révélations en tous genres, sûrement vous êtes-vous trompé de livre. Non pas qu'il soit dépourvu de ces trois qualités, mais peut-être en est-il pourvu d'une manière à laquelle on ne s'y attend pas. Cette tension et ce danger permanents qui guettent Starr forme une toile d'action "passive" très intense tout au long de la lecture. Les choix évolutifs de la jeune fille constituent la matière première de chaque rebondissement. Quant aux révélations, elles sont bien présentes mais moins en terme d'irruption, comme une bombe explosant dans les tranchées, que sous la forme d'une réalisation insidieuse et progressive, qui pousse à la réflexion et à un recul total.


Ma plus grande peur en abordant ce récit était de le voir traité avec facilité, sans autre profondeur "qu'une" polémique toujours plus actuelle sur les "bavures" policières concernant des représentants de la communauté noire. Je craignais que le fond, s'il était plus qu'intéressant en soi, ne fasse que l'objet de longueurs et de redites, sans portée particulière. Mais progressivement, tout cela s'est étoffé pour devenir, au-delà d'un ouvrage sur le racisme inter-communautaire, un ouvrage sur les liens, l'amitié, la famille, la solidarité, la liberté, l'acceptation, la reconnaissance, la prise de parole, le passé, le présent et même, voire surtout, le futur.


Alors oui, le racisme et le regard porté sur la communauté noire reste bien évidemment l'épicentre de ces divers sujets. Mais j'ai grandement apprécié la facette qui était mise en avant. Non pas nécessairement le simple rejet d'une couleur différente de la sienne, mais les préjugés plutôt liés aux activités auxquelles les "hommes de couleur" sont bien souvent obligés de s'adonner, car pris dans le piège de la facilité, à la suite d'une ségrégation qui les a conduit à une situation précaire. Dans les faits, One-Fifteen n'a pas spécifiquement tiré par pur rejet raciste, mais plutôt à cause d'un préjugé concernant les activités d'un adolescent noir présent dans un quartier sensible, ce qui reste une forme de racisme à part entière. Il est rare que cette perspective se voit aussi finement décortiquée.


Tout comme il est à souligner de voir le rejet du "blanc", chez certaines personnes noires, abordé dans ce livre. Alors même qu'il se bat pour l'acception et la reconnaissance de la voix des communautés noires, le père de Starr se retrouve tout de même à remettre en cause la relation de sa fille avec un représentant de la communauté blanche. Et c'est bien finalement tout le point soulevé par Thug Life : The Hate U Give Little Infants Fucks Everybody, "La Haine Qu'on Donne Aux Bébés Fout Tout Le Monde En l'Air". La manière dont on nous apprend à voir le monde, toutes les blessures et la colère prises de plein fouet ou infligées à cause d'une simple différence, d'une simple couleur de peau, explose au visage de la société une fois ces enfants devenus grands.


Et c'est là la plus grande force de ce livre : il est témoin, au-delà de ce constat, de l'évolution de Starr. Rares sont les ouvrages qui peuvent se targuer de faire grandir véritablement un protagoniste en quelques centaines de pages. Starr n'est pas devenue une personne différente malgré les épreuves ; elle a juste appris et grandi. C'est sa fidélité à elle-même, couplée à la maturité que lui font gagner chaque étape de sa vie, qui la mène du point A au point B sans raccourci. Et c'est aussi ce qui fait de ce récit tout le contraire d'un récit moralisateur. Il est porteur de morale et de valeur, certes, mais il n'a pas vocation à culpabiliser - juste à ouvrir les yeux, savoir et comprendre. 


J'ai déjà entendu dire qu'il s'agissait du type d'ouvrage qu'on lit et dit apprécier pour se donner bonne conscience, et je crois bien qu'il ne faut rien avoir compris à celui-ci pour présumer du ressenti de chacun. Car comme le disait si bien Julia Roberts à Tom Hanks dans le film Il N'est Jamais Trop Tard : "Qui présume assume de résumer" 😊


Voilà pourquoi il est à mon sens important que ce livre passe entre toutes les mains, non pas parce qu'il est particulièrement un coup de cœur à mes yeux, mais parce qu'il fait sens et peut faire progresser les mentalités dès le plus jeune âge. À mesure que je le lisais, je ressentais la même force d'un genre particulier que je trouvais en visionnant des films comme Jamesy Boy ou encore Vingt-Quatre Heures Avant La Nuit, et qui avait su laisser leur empreinte sur moi. The Hate U Give, en tant que roman, rejoint ces œuvres uniques. En est-il de même pour son adaptation cinématographique ?


Car si cet avis est rédigé à chaud, c'est bien parce que j'ai à la fois terminé le roman en fin de matinée, et le film en début d'après-midi. Je n'aurais pu faire mieux en terme de comparatif et de jugement que de passer de l'un à l'autre, tant que j'étais encore sous le coup de tout ce que ma lecture faisait tourner dans ma tête. 


Autant annoncer la couleur tout de suite : je me retrouve un peu déçue. Et même beaucoup, uniquement du point de vue de l'adaptation. Indépendamment, ce film est une réussite, porté par une belle réalisation et un casting hors pair. Je l'aurais peut-être autant apprécié que le livre si justement celui-ci n'existait pas. Mais voilà, l'altération de certains événements, la perturbation du déroulement, l'absence de personnages clés, la simplification des caractères et les trop nombreux raccourcis m'ont laissé un petit goût amer à la suite de cette profusion de détails dont nous avait nourri l'auteure. Cela étant, j'ai bien conscience que deux heures treize de long-métrage reste déjà une adaptation plus que respectable et conséquente, mais cela m'aura tout de même laissé sur ma faim en terme de fidélité 🤔


Un dernier point concernant le livre sur lequel j'aimerais revenir avant de conclure cette review et qui concerne le niveau de langage employé. J'ai entendu dire de certains côtés que les amoureux de la langue française n'apprécieraient pas la multitude de mots familiers et grossiers qui ponctuent l'ouvrage. Je me permettrai de me prononcer sur la question en affirmant qu'espérer un niveau de langage plus soutenu dans le contexte et les conditions de l'ouvrage serait aussi incongru qu'insensé. Pour avoir pris connaissance du texte dans sa langue d'origine, le slang comme on dit (comprenez un équivalent de notre argot), fait partie intégrante de l'identité du livre et ne rebute pas le moins du monde à la lecture 🤷‍♀️


Un livre - et un film, malgré tout - que je vous recommande chaudement, dans tous les cas, et qui ne pourront pas vous laisser complètement indifférent 😉



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🌟🤜🏻🤛🏾
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Le petit mot de la fin 🖋


Ce retour sur le roman « The Hate U Give » n’est que le fruit d’une appréciation générale de la lectrice perdue au milieu d’une foule de tant d’autres que je suis. Les remarques, positives comme négatives, qui y sont établies ne sont que le reflet de mon avis personnel sur la question et ne sauraient s’autoproclamer références en la matière ☝


N’hésitez donc jamais à ouvrir vous-mêmes ce livre pour vous en faire votre propre avis et si je ne pouvais vous donner qu’un conseil, terminez-le quoi qu’il en soit, afin d’avoir toutes les cartes en mains pour vous prononcer sur la qualité de celui-ci dans son intégralité 😉


N’oublions jamais qu’un roman dont la lecture ne nous prend que quelques heures représente en réalité des mois de travail acharné de la part de l’auteur, qui a mis une importante part de lui dedans et qui a pris le risque d’exposer son bébé au reste du monde 💚






                                                                                                                                              Roman-e

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